”Loi justice” : Quels impacts sur la procédure de saisie sur salaire

Lorsqu’un salarié a des dettes, il peut s’en acquitter volontairement en cédant une partie de sa rémunération à son créancier, c’est la cession du salaire. Mais un créancier peut également mettre en œuvre la procédure de saisie sur salaire et dans ce cas, il perçoit directement de l’employeur du débiteur (le salarié) le remboursement de la créance que ce dernier lui doit.

Actuellement, la procédure de saisie des rémunérations est mise en œuvre sur autorisation judiciaire, après échec d’une tentative de conciliation menée par le juge. Si la saisie est autorisée, l’employeur peut procéder, sous conditions, à une saisie sur le salaire d’un salarié, à partir du moment où il a été informé par la réception d’un acte de saisie des rémunérations envoyé par le greffe du tribunal judiciaire.

L’employeur doit ensuite adresser chaque mois au secrétariat-greffe du tribunal judiciaire une somme égale au plus de la quotité saisissable de la rémunération du salarié.

La saisie sur salaire se calcule à partir de sommes prélevées sur les revenus saisissables qui sont calculées à partir d’un barème révisé annuellement. Un décret fixe un barème progressif permettant de déterminer la fraction de revenu saisissable ou cessible par tranche de rémunération. Ce barème est en principe mis à jour tous les ans (R 3252-2 du Code du travail).

Concernant le nouveau barème de saisie sur rémunération 2024, fixé par le décret n° 2023-1228 du 20 décembre 2023, les quotités saisissables annuelles pour les 7 tranches sont calculées de la manière suivante à compter du 1er janvier 2024 :

  • 1/20e sur la tranche inférieure ou égale à 4 370 €
  • 1/10e sur la tranche supérieure à 4 370 € et inférieure ou égale à 8 520 €
  • 1/5e sur la tranche supérieure à 8 520 € et inférieure ou égale à 12 690 €
  • 1/4 sur la tranche supérieure à 12 690 € et inférieure ou égale à 16 820 €
  • 1/3 sur la tranche supérieure à 16 820 € et inférieure ou égale à 20 970 €
  • 2/3 sur la tranche supérieure à 20 970 € et inférieure ou égale à 25 200 €
  • La totalité sur la tranche supérieure à 25 200 €.

Ces seuils sont augmentés de 1 690 € par an soit 134,16 € par mois et par personne à charge.

Pour mémoire : quelle que soit l’origine de la dette (saisie administrative à tiers détenteur, paiement direct…), le débiteur conserve un montant forfaitaire correspondant au Revenu de solidarité active (RSA), soit à 607,75 euros par mois jusqu’au 31 mars 2024, pour une personne seule sans enfant. C’est le solde bancaire insaisissable (SBI).

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La nouvelle procédure ?

Après sa validation par le Conseil constitutionnel le 16 novembre 2023, la Loi 2023-1059 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 a été publiée au Journal Officiel le 21 novembre 2023. Cette nouvelle loi présente des dispositions relatives aux relations de travail.

Plus précisément, l’article 47 modifie la procédure de saisie des rémunérations. Les dispositions relatives à la saisie sur salaire du code du travail basculent dans le code des procédures civiles d’exécution : ainsi, après l’entrée en vigueur de la réforme, il conviendra de se référer aux articles L. 212-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution pour les dispositions relatives à la procédure de saisie sur salaire et aux articles L. 3252-1 et suivants du code du travail pour les dispositions relatives à la protection des rémunérations. La mise en œuvre de la saisie des rémunérations est confiée au commissaire de justice au lieu du juge de l’exécution du tribunal judiciaire et la procédure est par conséquent remaniée.

Cette loi transfère la compétence du juge de l’exécution du tribunal judiciaire vers le commissaire de justice.

Pour rappel : Le commissaire de justice est une profession née en 2022 de la fusion des métiers d’huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire.

Avec la réforme, si le salarié-débiteur et le créancier ne trouvent pas d’accord, la procédure de saisie sera initiée par le créancier auprès du commissaire de justice au lieu du juge d’exécution du tribunal judiciaire. La procédure sera mise en œuvre après la délivrance au salarié d’un commandement de payer, assorti d’un délai d’un mois lui permettant de contester la validité de la mesure devant le juge ou de conclure un accord avec le créancier sur les modalités de paiement.

L’employeur (dénommé tiers saisi) recevra un procès-verbal de saisie (au lieu d’un acte de saisie) et sera chargé de donner un certain nombre d’informations, dont le montant de la rémunération versée au salarié débiteur, sous certaines réserves indiquées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 16 novembre 2023.

L’employeur opérera la saisie à partir du seul procès-verbal de saisie du commissaire de justice. Il règlera chaque mois, les sommes entre les mains d’un commissaire de justice, dans la limite des règles du code du travail sur la quotité saisissable. Le procès-verbal de saisie devra être signifié à l’employeur dans les 3 mois suivant la délivrance du commandement de payer.

  La loi prévoit qu’à tout moment, le débiteur pourra contester la mesure de saisie devant le juge de l’exécution (art. L. 212-4 nouveau du c. proc. civ. exéc.). La contestation suspendra la procédure de saisie si elle est formée dans un délai d’un mois à compter de la signification du commandement de payer. Mais au-delà de ce délai d’un mois, la contestation n’aura pas d’effet suspensif sur la procédure de saisie.

Le texte de loi prévoit également la constitution d’un registre numérique des saisies des rémunérations, permettant de lister un ensemble d’informations relatives aux débiteurs, créanciers, commissaires de justice répartiteurs et employeurs tiers.

L’article 47 de la loi du 20 novembre 2023 entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er juillet 2025. Il est applicable aux cessions des rémunérations et aux procédures de saisie des rémunérations autorisées à cette date.